Los Hijos De Fierro
Dès « L’heure des Brasiers », j’avais projeté de réalisé un film épico-politique, inspiré du grand poème national « Martin Fierro » (1872). Ce qui m’attirait, ce n’était pas seulement que ce poème exprimait, comme aucun autre ouvrage de notre littérature, l’identité culturelle et les sentiments profonds du peuple argentin, mais surtout qu’il en traduisait les conflits de manière actuelle. À près d’un siècle de distance, « Martin Fierro » continue à marquer la ligne de séparation entre deux conceptions culturelles opposées : l’une colonisée, l’autre nationale. Ainsi, par exemple pour Jorge Luis Borges : « Notre histoire est beaucoup plus complexe que les vicissitudes d’un gaucho joueur de couteau et déserteur, même contées sur un mode admirable. » Pour Leopoldo Marechal, au contraire, Martin Fierro est « un déserteur de l’usine impérialiste du progrès » et ce poème, « matériau artistique qu’il nous faut cultiver, exprime le fait d’être argentins et latino-américains. » J’ai réalisé une libre paraphrase du poème original, conservant son essence, mais le ré-interprétant en termes historiques. J’ai traité Martin Fierro non comme une individualité, mais comme une représentation de la conscience nationale, et ses fils comme un personnage collectif : le peuple. Me servant de la tradition orale et du langage de la culture populaire, j’ai raconté en vers un moment de notre Histoire et j’ai tenté de le recréer avec la participation du peuple. « Les Fils de Fierro » est un fragment de la mémoire populaire, qui exprime de manière critique la résistance du peuple et sa lutte pour sa libération. Même s’il se réfère à un autre moment politique et si son tournage s’est déroulé il y a cinq ans, les circonstances douloureuses que vit notre pays confère une nouvelle vigueur et une actualité profonde au vieux rêve de Martin Fierro : celui d’un pays où la paix et l’unité sont inséparables de la justice et de la liberté. Comme il le disait lui-même : « Los Hermanos sean unidos Porque esa es la ley primera Tengan union verdadera En calquier tiempo Si entre ellos se pelean Los devoran los de afuera. » (« Que les Frères soient unis, car telle est la première loi ; qu’à tout moment chacun soit pour l’autre un réel ami ; s’ils se disputent, alors les mangent ceux du dehors. ») Fernando EZEQUIEL SOLANAS
Fiche artistique & technique
Scénario
Fernando Ezequiel Solanas
Production : LITTLE BEAR PRODUCTIONS, Paris (Mme Dumontet) / TELEPOOL, Munich